6 questions pour connaître Myriam Yahiaoui

J’ai eu l’honneur d’interviewer Myriam Yahiaoui après son atelier, dont vous découvrirez la thématique à la lecture ci-dessous. Pour vous inscrire au prochain atelier qui aura lieu le samedi 16 avril avec Laurence Feliz, c’est ici ! Vous travaillerez autour des connexions, connexions à soi, aux autres, aux silences…

1/ Qui es-tu, d’où viens-tu ? 

Je m’appelle Myriam, j’ai 30 ans et j'ai grandi en région parisienne, au Chesnay. Je suis franco-tunisienne, française de ma mère et tunisienne de mon père, je comprends un peu l’arabe mais je ne le parle pas. 

Myriam Yahiaoui sur la scène du Pourquoi Pas ? Café culturel le 19 janvier 2022

2/ Raconte nous ta vie d’improvisatrice 

J'ai découvert l'improvisation théâtrale à l'âge de 12 ans dans l’atelier de mon collège et mes copains se sont inscrits donc moi aussi. Je me suis prise de passion pour cette pratique, j’ai voulu en faire un peu plus et mes parents m’ont inscrite aux ateliers d’impro d’un Centre social à côté de chez moi. J’ai fait partie du tournoi des Yvelines, le tournoi de la LIDY, avec des matchs d’impro. Pour moi c’était de la folie à ce moment-là de jouer dans une autre ville avec d’autres jeunes improvisateurs ! Ensuite j’ai arrêté quelques années pour reprendre pendant mes études, j’ai fait un D.U.T Carrières Sociales - Animation socio-culturelle parce que je m’étais découvert une passion pour l’animation et j’ai bien vu ça allait très bien avec l’impro. Je faisais les colonies de vacances, les centres de loisirs… Une année d’échange au Québec m’a été proposée et je me suis rappelée que c’était le berceau de l’improvisation, ça a été un des éléments moteurs de mon départ. J’ai fait des camps de recrutement, les équipes d’impro recrutent comme ça leurs improvisateurs. J’en ai tenté deux, j’ai été reçue au deuxième, la LACI. On jouait une fois par semaine à l’Université et j’ai abordé une nouvelle façon d’improviser. J’ai beaucoup appris avec eux, de leur humour, leur construction d’histoire… Quand je suis rentrée chez moi j’étais un peu déprimée et je suis partie à Bordeaux pour la suite de mes études. J’ai animé des ateliers d’impro dans des collèges dans le cadre du Trophée Culture et Diversité, parrainé par Jamel Debbouze et soutenu par le gouvernement notamment, ce sont des gros événements. Grâce à des rencontres j’ai pu intervenir dans des structures médico-sociales et l'enseignement de l’impro m’a beaucoup plu. Maintenant je travaille avec beaucoup de structures différentes, des primaires, collèges, lycées, centre de détention, associations, avec des jeunes mineurs étrangers isolés, des personnes en situation de handicap, des jeunes en insertion-réinsertion… Ces ateliers sont mis en place pour leur faire découvrir une pratique artistique et leur montrer qu’ils peuvent s’exprimer à travers elle. Transmettre me plaît beaucoup et jouer aussi, je joue avec les Restons Calmes qui est ma ligue de cœur, on crée des formats, on organise 3 festivals par an à Bordeaux aux Chartrons… Travailler avec eux est très intéressant. Avec tout ça je suis aussi une grande kiffeuse, j’adore rire et les moments simples avec mes proches, je me sens très épanouie. 


3/ Quelle est ton histoire avec Atlas ? 

Je connais Atlas depuis ses débuts et leur volonté de traiter des thématiques comme l'interculturalité avec comme outil principal l’impro, ça me parle beaucoup et j'ai eu la chance de rencontrer des membres d’Atlas auxquels je commence à me lier d‘amitié. Je suis toujours très intéressée par l’arrivée de nouvelles initiatives improvisées donc j’ai voulu m’y frotter et j’ai été invitée à jouer leur spectacle Invitation au voyage pendant lequel j’ai pris beaucoup de plaisir, ainsi qu’à animer un atelier mensuel pour lequel on m’a fait grande confiance en me donnant carte blanche ! J’ai choisi le thème de la magie et des différents niveaux de réalité en improvisation, thème que j’ai moi-même découvert lors d’un stage de Omar Galvan, célèbre improvisateur argentin. C'était en 2017 mais ça m’a beaucoup marquée, ça a eu un fort impact sur mon jeu, ma manière de réfléchir et même de vivre mes impros. 


4/ Qu’est ce que t’apporte le théâtre d’improvisation ?

J’ai commencé à 12 ans et j’ai adoré pouvoir jouer plusieurs personnages, l’impro c’était l’endroit où je pouvais. Être valorisée, applaudie, ça fait quelque chose. Pour être honnête, je ne sais plus qui est Myriam sans l’improvisation, ça fait tellement partie de moi, c’est comme une drogue, je ne sais plus qui je suis sans ma dose. Au quotidien, je me sens très chanceuse de pouvoir travailler et vivre de ma passion. Ça m'a apporté des rencontres qui font la personne que je suis devenue et grâce à cette pratique les rencontres ne sont jamais finies, je rencontre des nouvelles personnes qui veulent connaître et apprendre cet art, ou d’autres qui le pratique déjà beaucoup, et j’ai l'impression qu’on se ressemble autour de plein d’aspects. L’impro crée des liens forts ! J’ai pu voyager aussi, ces voyages ont une autre saveur que les voyages sans impro, on est hébergé chez l’habitant, on vit avec les gens et ça n’a pas besoin d'être à des centaines de kilomètres de chez soi pour être déroutant. J’ai été invitée deux fois au festival de Casablanca organisé par les Stoon’Zoo, originaires de la ville, l’été dernier j’ai joué dans un festival francophone dans les théâtres nationaux de Nice, Grasse et Carrosse avec pleins d’autres improvisateurs français, j’ai fait deux tournées au Québec en 2018 et 2019 avec des amis, c’était incroyable… Comme c’est ma passion et mon gagne-pain, c'est génial, je le souhaite à tout le monde. Ça ne veut pas dire que ce n’est pas difficile parfois, il faut de l’énergie pour animer un atelier, mettre de côté ses émotions… Mais c’est très porteur et je ne m’ennuie jamais, tout est toujours différent dans l’impro. 

5/ Peux-tu me raconter une anecdote vécue pendant un spectacle ? 

Ce que je trouve le plus magique en impro, c’est de jouer et de co-construire des histoires avec des personnes qu’on ne connaît pas. Lors de mon premier festival au Maroc un joueur marocain ne maîtrisait pas bien le français et pour autant, il n’y a jamais eu de problème de compréhension, malgré les mots que chacun ne comprenait pas de l’autre on parlait le même langage. Je veux souligner ça parce que cette pratique est universelle et malgré la séparation de la langue on parvient à se comprendre sur scène et ça c’est magnifique. Quand on joue, on donne à notre partenaire un accès à notre intimité différent de celui de la vie de tous les jours. 

6/ Voudrais-tu rajouter quelque chose ? 

Souvent dans les structures quand il y a atelier d'impro ou de théâtre les gens pensent qu'ils vont jouer dans une langue qu’ils ne maitrisent pas, de l'ancien français, ou qu'ils vont porter des costumes ridicules ou encore que ça ne leur est pas accessible par manque de culture… Je trouve que l’impro c’est une super démocratisation de la pratique théâtrale. Par exemple, avec les jeunes, ça m’arrive très souvent d’aborder dans un premier temps l’impro pour aller plus loin en leur proposant de jouer “à la manière de”, à la manière de Molière et de pleins d’autres auteurs et ça va leur donner envie de s’intéresser au travail de ces auteurs, ça va aiguiser leur sens critique et ils vont vouloir s’y frotter. 

Interview et transcription : Tess Cazenave